Oscar et la dame rose - Eric-Emmanuel Schmitt
L'auteur: Eric-Emmanuel Schmitt (né en 1960) est un écrivain français assez en vogue en ce moment. Normalien, agrégé de philosophie, il a reçu également le Goncourt de la nouvelle, genre auquel il s'est adonné dernièrement.
Le livre: "Cher Dieu". Voici les lettres que le petit Oscar, dix ans, vient de commencer à écrire. Il a dix ans et une leucémie l'oblige à habiter à l'hôpital. Oh bien sûr, il sait qu'il va mourir, mais personne n'ose le lui dire. C'est Mamie-Rose, une des bénévoles de l'hôpital, qui lui a conseillé d'écrire à Dieu. Pour voir. Mamie-Rose, Oscar l'aime bien. Elle, au moins, ne le traite pas comme une toute petite chose fragile. D'ailleurs, Mamie-Rose a été catcheuse, avant! Et Mamie-Rose en a eu une autre, de bonne idée: vivre les dix prochains jours comme si chacun d'eux durait dix ans. Alors dans chacune de ces lettres à Dieu, Oscar raconte une décennie.
Conseillé par ma belle-soeur qui l'a lu au collège et l'a adoré, j'ai profité d'une visite chez la belle-famille pour avaler ce petit livre. Très vite lu, il m'a d'abord laissé perplexe. Perplexe comme "mouais, un truc bien classique en somme". Et puis avec le recul, j'ai été très touchée. Une émotion à retardement. Le ton de surface se veut optimisme, gai et frais, et c'est tout l'art de ce petit livre que de nous faire vivre à la fois cette gaité de l'instant présent et cette réalité, ce véritable compte à rebours. Vivre une vie en accéléré, ne surtout rien rater, des premières amours aux responsabilités d'adulte, voilà le défi que Mamie-Rose lance à Oscar. Pari tenu: Oscar va tout vivre, à sa manière, à son niveau. Et l'on sourit avec lui, le cœur gros de savoir que tout se passe dans un hôpital dont il ne sortira jamais. Faire du pire des cauchemars un jeu, un rêve, une fantaisie, c'est aussi le pari du film de Roberto Benigni, La vie est belle, devant lequel vous avez tous pleuré comme moi (non, non, ne mentez pas). Même résultat. Un parfum du Petit Prince qui rentre chez lui.
La bande-annonce du film m'a plu (j'aime bien Michèle Laroque) alors je me laisserai peut-être tenter.
Aujourd'hui, Eric-Emmanuel Schmitt est à l'honneur chez Pimprenelle! Vous y retrouverez des articles vers plusieurs livres de cet auteur.
Le film: en 2009, le film sort sur nos écrans. Et comme on n'est jamais mieux servi que par soi-même, c'est Eric-Emmanuel Schmitt qui s'occupe de le réaliser. Il confie au jeune Amir Ben Abdelmoumen le rôle du petit Oscar, et c'est une franche réussite: le jeune comédien rend parfaitement ce mélange de gravité, de lucidité et d'innocence infantile qui faisait le personnage du roman. La grosse modification tient dans le rôle de Mamie-Rose. D'ailleurs, exit Mamie: Rose est devenue une femme d'affaire moderne et stressée qui vend des pizzas et refuse toute idée de bénévolat. Trahison? Oui... et non. Avoir confié ce rôle à Michèle Laroque est une vraie trouvaille: blonde et rose à l'extérieur, cassante et froide à l'intérieur, elle campe un personnage très intéressant et porte à merveille le costume de catcheuse. Mamie-Rose devait rendre le quotidien d'Oscar plus fun; cette Rose-là remplit le rôle haut la main. C'est elle qui se charge de remettre à Dieu les lettres d'Oscar, attachées à un ballon d'hélium. Quelle poésie dans les images... Très bien filmé, mais aussi riches de métaphore et de mises en scènes: les rêves d'Oscar et les histoires de Roses font tous l'objet de saynètes fantasmagoriques et c'est un plaisir de se laisser porter par ces visions oniriques. Le microcosme de la bande d'enfants malades est particulièrement bien rendu et l'on croit sans peine aux jeux qu'ils mettent en place "comme si c'était la vraie vie". On appréciera aussi la musique de Michel Legrand (Peau d'Ane, Les Demoiselles de Rochefort) qui achève de donner à ce film une ambiance de conte triste. Le livre m'avait profondément émue, le film a réussi à me tirer des larmes. Et même si DjéDail dit que non, je l'ai vu, lui aussi a pleuré. Je vous recommande donc à tous ce livre et ce film, de petits bijoux.