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Ma bouquinerie
22 juillet 2013

Aux âmes sensibles - Emilie Cartier

aux âmes sensiblesCe recueil de contes n’est pas de ceux que l’on raconte aux enfants. Ici, les contes sont cruels, amers. La pluie, Marc ne l’aimait pas, jusqu’à ce qu’elle le fascine, plus attirante encore qu’une femme. Dans la rue Gaufrette, la vieille épicière a la réputation d’être une sorcière, et la jeune Elsa peut se faire bien des frayeurs en allant chercher une simple boite de sauce tomate. Qui sont ces petits êtres de lumière, apparus dans la forêt, et dont tous les villageois prennent grand soin, les accueillant même dans leurs maisons, avec une bienveillance peut-être un peu imprudente? Quant au poète, il pleure devant une Nature devenue une poubelle géante, mais lorsque Mère Nature se relève et laisser sa vengeance se répandre, elle est sans pitié. Géraldine, elle, dans sa cuisine, fait de son mieux pour remplir chaque jour le ventre de son mari grossier et violent. Pour Bérénice, la maison est vide, et même si elle s’est résigné à la stérilité de son mari et à la présence du teckel Gérald, ce vide la ronge. La maisons de la magicienne aux balivernes, elle, est à vendre: la vieille dame est décédée, laissant derrière elle des enfants baignés à ses histoires merveilleuses de la perruche Frénégonde voyageant à travers le monde et rapportant toujours une photo de ses escapades. Camille et Grégoire ne vivront pas heureux pour toujours: la bête noire les guette. Et n’avez-vous jamais rêvé d’arrêter le temps? Léonard le petit génie l’a fait, mais curieusement, ce n’est pas du goût de tout le monde.

Ces histoires sont du genre de celles que j’aime. Même s’ils fonctionnent sur les mêmes ressorts que les contes de fée traditionnels, ils prennent une tournure plus sombre. Parfois, c’est le quotidien qui se retrouve investi d’une ambiance à la fois onirique et dérangeante. La maison, trop vide, devient oppressante; la pluie qui devait nous confiner à l’intérieur finit par attirer dehors; la maladie qui guette le couple devient une bête dont personne ne se méfie. Parfois, on retrouve un univers complètement imaginaire qui pourtant se laisse gagner par des malaises bien tangibles: mère Nature n’hésite pas à faire payer dans le sang les méfaits que les hommes lui ont infligés, des créatures inconnues gagnent la confiance des gens avant de se révéler prédateurs, le rêve d’une vie éternelle devient le pire crime commis car la vieillesse pèse quand la mort ne vient pas. Ce subtil mélange d’imaginaire et de cruauté réaliste est ce qui fait l’originalité et le charme de ces petites histoires.
Quant au style, lui aussi entretient ce flottement. Quelques-unes de ces nouvelles refusent d’apporter une réponse franche à ce qui s’est réellement passé, comme avec cette mystérieuse pluie par exemple. Plusieurs s’arrêtent soigneusement juste avant la catastrophe finale, ce qui laisse dans une forte impression de fatalisme très efficace. Et ça fonctionne: chacune laisse sur un suspens souvent très marquant. Toutefois, j’ai parfois regretté quelques phrases finales qui voulaient fournir une explication inutile qui tombaient un peu à plat : il vaut mieux parfois nous laisser avec nos hypothèses. Mais pour le reste, concilier univers du conte et une part de cynisme onirique m’a beaucoup plu.

La note de Mélu:

Note 5

Un petit livre pour de grands effets.

Un mot sur l’auteur: Emilie Cartier est une auteure française. D’autres de ses œuvres sur Ma Bouquinerie:

derrière la porte

challenge petit bac

catégorie “sentiment”

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Commentaires
D
J'avais lu son autre ouvrage, mais pas celui-ci...
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L
J'aime bien les contes cruels dans ce genre ! Je note la référence. :)
Répondre
Ma bouquinerie
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