Entretien avec un vampire - Anne Rice
L’auteur : Anne Rice est née au début des années 1940 à La Nouvelle Orléans. Toutes ses œuvres rendent d’ailleurs hommage à cette ville empreinte de culture vaudou et d’influences françaises.
Le livre : Dans les années 1970, un journaliste a rendez-vous avec un homme étrange dans une chambre d'hôtel... un vampire. Calmement, celui-ci accepte de lui raconter sa vie, qui va s'inscrire peu à peu sur la bande magnétique des cassettes qui enregistrent la conversation. Dans les années 1780, Louis a un peu plus de vingt ans et vit dans la grande propriété de la Pointe du Lac, près de la Nouvelle Orléans. Très marqué par la mort de son frère dont il se sent responsable, il est approché par Lestat, un vampire fascinant, qui le transforme en vampire. Très vite, leur relation se pervertit: Louis a besoin de Lestat pour savoir de quoi est constituée sa nouvelle vie, et celui-ci lui laisse toujours entendre qu'il en ignore encore beaucoup, mais Lestat semble surtout profiter de la présence de Louis pour combler sa solitude et s'accaparer la propriété. Lorsque les esclaves flairent leur nature maléfique et se révoltent, ils fuient à la ville. Pendant que Lestat s'amuse à séduire de jolies femmes et à meubler leur maison de toutes sortes de babioles, Louis est déchiré entre son besoin de sang et son désir de ne pas être une créature maléfique. C'est alors que Lestat décide de transformer en vampire une des victimes à laquelle Louis a cédé, Claudia, une petite fille de cinq ans...
Quel plaisir que de relire ce livre qui avait tant marqué mon adolescence! Et quel plaisir de me dire que le suivant m'avait encore plus plu et que sa relecture m'attend! L'écriture d'Anne Rice a quelque chose d'envoûtant, de feutré, qui surprend dans un roman pourtant caractérisé de terrifiant, comme si Louis y imprimait déjà son regard blasé, lourd de son passé. Ici, je retrouve le Louis qui relègue Edward Cullen au rang d'amateur. On ne peut que s'attacher à cet être solitaire dont la responsabilité pèse, qui se fait voler sa vie, son humanité, ses terres, qui refuse cette fatalité d'être maléfique parce que l'on doit se nourrir de sang et qui se retrouve dépendant d'un créateur qu'il déteste et qui le manipule. Car on entrevoit aussi ici un Lestat plus que versatile: que cherche-t-il réellement auprès de Louis? Pourquoi le maintient-il dans une telle ignorance, en véritable despote manipulateur? Frères ennemis, couple en destruction mutuelle dans une relation masochiste, le duo Louis-Lestat a déjà fait couler beaucoup d'encre et regorge d'interprétation, et on l'oberve avec un mélange d'horreur et de pitié, car j'ai finalement l'impression que tous les deux recherchent juste une forme d'amour et ont une peur panique de devenir le chasseur solitaire et maudit que la tradition leur impose. Mais le chef d'oeuvre d'Anne Rice dans ce livre, c'est Claudia. Poupée blonde, enfant que ce couple crée à deux, chasseuse redoutable, elle met mal à l'aise tant la description de ses dentelles blanches, de ses joues potelées, de ses boucles dorées sont volontiers trempées dans le sang. Car très vite, il apparaît qu'une enfant qui ne grandit pas, condamnée pour l'éternité à un corps fragile et si peu pris au sérieux, ne peut que développer d'étrange névroses. Mais comment savoir? Qui pourra les renseigner sur leur propre race, puisque Lestat les envoie balader et qu'il affirme qu'il n'existe aucun autre vampire sur terre? La quête initiatique ne fait que commencer.
La note de Mélu:
Une relecture réussie!
Titre original: Interview with a vampire (traduit de l'anglais américain).