Dimanche au musée n°54 : Giorgio di Chirico
Retour cette semaine à mes premières amours: le surréalisme, ou en tout cas un courant qui lui est apparenté. Giorgio di Chirico (1888-1978) est un peintre italien né en Grèce. Très jeune, il produit des tableaux mystérieux, dont les titres reprennent souvent le mot "énigme". Il crée son propre mouvement de peinture, la peinture métaphysique. Pour l'illustrer, voici Ariane.
Issue de la série des Méditations, ce tableau tient son titre de la figure allongée, dont je vous reparlerai plus loin. Un paysage d'une étonnante immobilité. Une grande arène uniquement occupée par cette femme allongée, qui ressemble largement à une statue à l'antique. A droite, des arches ouvertes vers un espace obstrué par l'obscurité, alors même que la lumière vient de derrière ce mur ouvert et pourtant si opaque. L'ombre mange peu à peu l'espace et elle semble sur le point d'atteindre le corps allongé, sans pour autant compromettre l'immobilité: l'ombe, on ne la voit jamais bouger. Au loin, une construction futuriste et indéfinissable. Silencieux, immobile, ce paysage relève d'une facture très classique: un personnage mis en scène dans un paysage représenté par quelques élémets architecturaux. Sauf que ces monuments sont difficilement identifiables, ne remplissent aucune fonction et ne font qu'isoler davantage le paysage. Sans jamais nous paraître complètemnt étranger, ce paysage est pourtant impossible à reconnaître et malmène notre raison. Même les personnages sont dénués de toute vie et l'Ariane annoncée n'est qu'une statue, une oeuvre d'art froide et glaciale, placée ici sans aucune autre raison que de meubler de vide un paysage déjà minime. Car on peut reconnaitre dans cette silhouette l'Ariane endormie du Primatice , représentant la princesse abandonnée sur une île déserte par Thésée.
Une référence ouverte à un bronze bien massif qui vient renforcer l'idée d'un simulacre de présence humaine, tout en rappelant l'idée que l'endroit où Ariane s'endort est justement celui où aucune vie ne se manifeste. Personnage labyrinthique, Ariane est un symbole à elle toute seule, celui de l'homme perdu, isolé, sans réponse et qui ici n'a aucun fil puisque aucune direction à prendre.
Qu'en pensez-vous?