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Ma bouquinerie
27 juin 2010

Dimanche au musée n°4: Fragonard

Dans un souci de varier les genres et les siècles, laissez-moi vous emmener maintenant au XVIIIème siècle, avec un maître de l'époque: Jean-Honoré Fragonard. Elève du non moins célèbre François Boucher, il devient célèbre dans les années 1750 en se spécialisant dans la peinture érotique. Cette œuvre de 1779, intitulée Le Verrou, est peut-être la plus célèbre du peintre (cliquez sur l'image pour agrandir).

fragonard_verrou

Nous voici dans un intérieur, une scène d'intimité. D'ailleurs, le jeune homme, en sous-vêtement (d'une grande indécence pour l'époque) ferme soigneusement le verrou de la porte, tout en enlaçant une femme, encore habillée et coiffée. Là tient la raison pour laquelle ce tableau est célèbre: la jeune femme semble repousser l'homme, mais tend la main vers le verrou également; Est-ce une scène d'amour? Un viol? Un adultère à cacher et à renier? La majorité de l'espace est occupée par le lit, objet du délit s'il en est, dans un grand désordre puisqu'on peine à démêler baldaquins, draps et oreillers. Second mystère: si les ébats ont déjà eu lieu, pourquoi fermer le verrou après? Et pourquoi un lit si riche et si garni dans une chambre aux murs nus et sans identité? J'aime les tableaux qui se refusent à l'interprétation définitive, qui proposent plusieurs histoires possibles, d'autant plus quand ces histoires sont justement cachées parce qu'elles sont immorales. Tout le tableau tient dans le jeu des regards, l'extension-répulsion des corps et dans la puissance symbolique de ce lit monumental, aux formes plus qu'évocatrice: regardez les deux oreillers qui se détachent en arrière-plan sur le fond rouge. Leur forme ne rappelle-t-elle pas une poitrine féminine dressée vers le ciel? Si vous suivez le prolongement de ce corps métaphorique, vous verrez un ventre, et même un genou qui s'écarte. Ce n'est pas moi qui le dit, c'est Daniel Arrasse, historien de l'art. Toute la composition vise à créer cette diagonale qui part du verrou, qui suit le bras, les regards, l'étreinte et qui finit dans les draps. L'histoire se lit de droite à gauche et les personnages ne sont qu'un prétexte pour tout ramener dans ces volutes rouges. Pas très fin, c'est sûr, mais au XVIIIème siècle, le libertinage est surtout un jeu, autant intellectuel que sensuel, un érotisme qui à peine caché par une fausse pudeur qui participe du plaisir même.

Alors, que pensez-vous de la (non)subtilité de Fragonard?

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Commentaires
A
J'aime beaucoup les tableaux de ce style. Je me plais à les regarder. C'est vrai que maintenant que tu le dis, je vois parfaitement la diagonale :)
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L
Un classique!!
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