Pars vite et reviens tard
L'auteur: Fred Vargas (née en 1957) est le pseudonyme d'une archéozoologue et historienne de formation, travaillant pour le CNRS avant de se consacrer à sa carrière d'écrivain.
Le livre: Joss le Guern, crieur de profession, reçoit depuis quelques mois d'incompréhensibles annonces, visiblement citations recopiées dans de vieux ouvrages, qu'il doit crier sur la place Edgar-Quinet. De son côté, le commissaire Adamsberg reçoit la visite d'une femme qui se plaint que d'étranges signes peints en noir apparaissent sur les portes des immeubles un peu partout dans Paris. Les deux affaires s'avèrent liées puisque tant les annonces que les signes prédisent l'arrivée d'un fléau que l'on croyait disparu. L'enquête ne s'annonce pas facile: les médias s'en mêlent, la population panique et brouille les signes, et la place Edgar-Quinet où tout converge est un repaire d'anciens prisonniers et de fausses identités.
Décidément je n'aime pas les polars. Moins encore quand ils sont aussi ennuyeux que celui-là. Jusqu'à la page 120, il ne se passe rien, aucun mort, aucune évolution, rien. Le plaisir de réunir les indices est complètement faussé: on nous sort un meurtrier de derrière les fagots, sans grande cohérence. Les histoires sentimentales du commissaires sont mieux traitées que son enquête, sauf que c'est pas le sujet. Et je ne parle pas des aberrations concernant le système judiciaire français, qui fait passer ce roman pour une tentative de copie des séries policières américaines: et non, en France, un mandat de perquisition, ça n'existe pas!!! Et toute l'érudition médiéviste et historique de l'auteur ne me fait pas avaler cette erreur dans un livre qui est quand même, à la base, un policier.
Je voulais lire un roman de Fred Vargas pour voir. C'est tout vu.
Le film: en 2007, Régis Wargnier propose une adaptation cinéma de ce polar. Chose surprenante, c'est José Garcia qui endosse le rôle d'Adamsberg. A contre-emploi, le comique déjanté sonne parfaitement juste en commissaire maniaque, taciturne et torturé. En face de lui, on note un Nicolas Cazalé épatant en jeune fanfaron embrigadé dans une histoire de vengeance familiale, un Michel Serrault très élégant dont le magnétisme naturel parviendrait presque à faire oublier qu'il n'est guère crédible en ex-taulard, et une Marie Gillain tout en fraîcheur et surprenante de versatilité. Le casting a donc tout bon, la mise en scène aussi: sombre, mélancolique, nébuleuse, les plans se passent souvent de dialogue et la musique nous entraînent réellement dans l'enquête plus psychologique que dramatique qu'avait voulu mettre en place Vargas. Les jeux sur les échos, les fondus et les superpositions de plans sont parfaitement réussis, ce film enlise le spectateur petit à petit avec succès. Bon, l'intrigue reste décevante pour moi (on ne peut pas non plus tout sauver), mais on en a fait ce qu'on a pu: ainsi dès le début l'on voit une silhouette sombre tracer les symboles sur les portes et ramasser des rats dans les égouts, ce qui entretient la tension bien plus efficacement que dans le livre. J'ai particulièrement aimé la course-poursuite en roller, une belle scène d'action réussie. Ambiance réussie du début à la fin, ce qui n'était pas gagné pour un policier cent pour cent français. Ce film m'a donc plu, presque touchée puisque j'ai enfin adhéré au personnage d'Adamsberg, ce qui n'était pas gagné.